Le recouvrement des factures impayées est un enjeu majeur pour les entreprises, notamment dans les relations entre professionnels (B2B). En cas de non-paiement, il est crucial pour les créanciers de savoir dans quel délai ils peuvent légalement exiger le règlement d’une facture. Ce délai, appelé prescription, détermine le temps au-delà duquel une entreprise ne pourra plus engager d’action en justice pour obtenir le paiement. Alors, quelle est la prescription pour une facture entre professionnels en France ? Cet article fait le point sur les règles à connaître pour protéger les droits des entreprises.
1. La notion de prescription en matière de créances commerciales
La prescription extinctive est un principe juridique qui limite dans le temps le droit d’un créancier à réclamer une dette. Une fois ce délai écoulé, le débiteur peut invoquer la prescription pour se libérer de son obligation de payer, même si la dette est toujours due. Le but de ce mécanisme est d’apporter une sécurité juridique aux relations commerciales en empêchant les créances de rester indéfiniment pendantes.
Dans le cadre des relations commerciales, notamment entre professionnels, la prescription d’une facture est encadrée par des dispositions spécifiques du Code de commerce.
2. Quel est le délai de prescription pour une facture entre professionnels ?
Le délai de prescription pour une facture entre entreprises est fixé à 5 ans par l’article L. 110-4 du Code de commerce. Cela signifie que le créancier dispose de 5 ans pour agir en justice à compter de la date à laquelle la facture est devenue exigible, c’est-à-dire dès que le délai de paiement convenu entre les parties a expiré.
Exemple : si une entreprise A envoie une facture à l’entreprise B avec un délai de paiement de 30 jours, le délai de prescription commencera à courir à partir du 31ème jour suivant la date d’émission de la facture.
3. Comment le délai de prescription d’une facture entre professionnels est-il calculé ?
Le point de départ du délai de prescription de 5 ans pour une facture entre professionnels commence dès que la facture devient exigible, c’est-à-dire après la date d’échéance mentionnée sur la facture. Si aucun délai n’a été spécifié, il s’agit généralement d’un délai standard de 30 jours à compter de la date d’émission de la facture.
En cas de paiement échelonné, la prescription commence à courir pour chaque échéance séparément. Ainsi, si une facture prévoit des versements mensuels, chaque mensualité impayée disposera de son propre délai de 5 ans.
4. Interruption et suspension de la prescription
Il est possible dans certaines circonstances d’interrompre ou de suspendre le délai de prescription, ce qui permet de prolonger la durée pendant laquelle le créancier peut agir.
- Interruption du délai : un acte de recouvrement tel qu’une mise en demeure, une assignation en justice ou un paiement partiel effectué par le débiteur peut interrompre le délai de prescription. Dans ce cas, le délai de 5 ans repart à zéro à partir de la date de l’acte interruptif (article 2240 du Code civil).
- Suspension du délai : le délai peut être suspendu dans certaines situations, par exemple en cas de force majeure, de négociations entre les parties ou d’accord amiable pour un report de paiement (article 2234 du Code civil). Idem en cas de médiation ou de conciliation (article 2238 du Code civil). Dans ces cas, le délai est simplement mis en pause et reprend là où il s’était arrêté.
Exemple : si une entreprise engage une procédure judiciaire pour récupérer une facture impayée après 3 ans d’inactivité, le délai de prescription est interrompu et un nouveau délai de 5 ans commence à courir.
5. Que se passe-t-il si le délai de prescription d’une facture entre professionnels est dépassé ?
Si le délai de prescription de 5 ans est écoulé sans qu’aucune action n’ait été entreprise par le créancier, la créance devient prescrite. Cela signifie que l’entreprise créancière ne pourra plus saisir le tribunal pour obtenir le recouvrement de la somme due. Le débiteur pourra invoquer la prescription pour se défendre contre toute action judiciaire.
Cependant, il est toujours possible pour le créancier de tenter un recouvrement amiable même si la dette est prescrite. Le débiteur n’a alors plus d’obligation légale de payer mais il peut choisir de le faire pour préserver de bonnes relations commerciales.
6. Conseils pratiques pour éviter la prescription
Pour éviter de se retrouver dans une situation où une créance devient irrécouvrable, voici quelques bonnes pratiques pour les entreprises :
- Suivre rigoureusement les échéances de paiement : mettez en place un système de suivi pour détecter les retards de paiement dès qu’ils surviennent.
- Envoyer des mises en demeure rapidement : si un paiement est en retard, envoyer une mise en demeure officielle par courrier recommandé avec accusé de réception permet d’interrompre la prescription.
- Engager des actions judiciaires à temps : ne laissez pas passer trop de temps avant d’engager des procédures légales si le recouvrement amiable échoue.
- Utiliser des huissiers ou des sociétés de recouvrement pour maximiser vos chances de recouvrer la créance avant que le délai de prescription n’expire.
7. Cas particuliers : la prescription et les contrats à exécution successive
Pour les contrats à exécution successive, comme les abonnements ou les contrats de maintenance, chaque facture émise est soumise à son propre délai de prescription de 5 ans. Cela signifie que si certaines factures impayées sont récentes, elles restent toujours récupérables même si d’autres factures plus anciennes sont prescrites.
En conclusion, la prescription d’une facture entre professionnels est encadrée par un délai de 5 ans, après quoi le créancier perd son droit d’agir en justice pour obtenir le paiement. Il est essentiel pour les entreprises de connaître ces règles et de mettre en place des procédures efficaces pour le suivi et le recouvrement de leurs créances. Si vous avez des factures impayées, n’attendez pas que le temps joue contre vous : agissez rapidement pour préserver vos droits.