Dans les relations commerciales, il est essentiel de connaître les règles de prescription applicables aux créances afin de savoir dans quel délai il est possible d’engager des actions en justice pour recouvrer une facture impayée. Les délais varient en fonction de la nature des parties impliquées : lorsqu’une facture est échangée entre un professionnel (entreprise, artisan, commerçant) et un particulier (consommateur), le délai de prescription est différent de celui applicable aux transactions entre professionnels. Cet article vous éclaire sur la prescription des factures dans ce contexte particulier tout en fournissant des conseils pour maximiser vos chances de recouvrement.
1. La notion de prescription en matière de créances
La prescription extinctive est un principe juridique selon lequel un créancier perd son droit d’agir en justice pour exiger le paiement d’une dette après un certain laps de temps. Passé ce délai, même si la dette reste due, le débiteur peut invoquer la prescription pour bloquer toute action judiciaire. L’objectif est de garantir la sécurité juridique des transactions, en évitant que des dettes ne pèsent indéfiniment sur les débiteurs.
2. Délai de prescription pour un facture entre un professionnel et un particulier
Lorsqu’un professionnel émet une facture à l’encontre d’un particulier (consommateur), le délai de prescription est encadré par le Code de la consommation. En France, ce délai est fixé à 2 ans, conformément à l’article L. 218-2 du Code de la consommation. Cela signifie que le professionnel dispose de 2 ans pour réclamer en justice le paiement d’une facture impayée à compter de la date d’exigibilité de la créance.
Exemple : si un artisan réalise des travaux pour un particulier et émet une facture datée du 1er janvier 2024 avec un délai de paiement de 30 jours, le créancier (l’artisan) aura jusqu’au 31 janvier 2026 pour engager une action en justice si la facture reste impayée. Après ce délai, la dette sera prescrite, et le professionnel ne pourra plus la faire valoir devant les tribunaux.
3. Calcul du point de départ du délai de prescription
Le délai de prescription de 2 ans commence à courir dès que la facture entre particulier et professionnel devient exigible, c’est-à-dire à la fin du délai de paiement convenu. Si la facture stipule un paiement sous 30 jours, le délai débutera au 31ème jour suivant la date d’émission de la facture.
Dans le cas où aucun délai de paiement n’est mentionné, la prescription de la facture entre particulier et professionnel commence dès la livraison du bien ou la prestation du service. Il est donc crucial pour le professionnel de bien préciser les conditions de paiement sur chaque facture afin de sécuriser ses droits.
4. Interruption et suspension de la prescription
Il existe des moyens d’interrompre ou de suspendre le délai de prescription d’une facture entre particulier et professionnel, permettant ainsi au créancier d’allonger le temps dont il dispose pour recouvrer sa créance.
- Interruption : la prescription peut être interrompue par des actes comme l’envoi d’une mise en demeure, une action en justice ou le paiement partiel par le débiteur (article 2240 du Code civil). Lorsqu’un tel acte est réalisé, le délai de 2 ans repart à zéro.
- Suspension : le délai de prescription peut être suspendu en cas d’obstacles insurmontables, comme un cas de force majeure, des négociations amiables, ou encore des procédures de médiation (article 2234 du Code civil) Idem en cas de médiation ou conciliation (article 2238 du Code civil). Contrairement à l’interruption, la suspension met simplement le délai en pause, sans le réinitialiser.
Exemple d’interruption : si un commerçant envoie une mise en demeure au particulier 18 mois après la date d’échéance de la facture, le délai de prescription sera interrompu et un nouveau délai de 2 ans commencera à courir à partir de la date de la mise en demeure.
5. Que faire si le délai de prescription est dépassé ?
Une fois le délai de prescription de 2 ans expiré, le créancier perd le droit d’agir en justice pour obtenir le paiement. Toutefois, cela n’efface pas la dette elle-même : le particulier peut encore choisir de régler la somme due mais il ne peut plus être contraint de le faire par voie judiciaire.
Dans ce cas, le professionnel peut toujours tenter une négociation à l’amiable pour obtenir le paiement. Si le débiteur est disposé à régler sa dette, même après la prescription, cela peut préserver la relation commerciale.
6. Bonnes pratiques pour éviter la prescription
Pour éviter de se retrouver face à une créance prescrite, les professionnels peuvent suivre certaines bonnes pratiques :
- Suivre de près les échéances de paiement : mettre en place un système de relance automatisée pour détecter les retards.
- Envoyer des mises en demeure : en cas de retard de paiement, une lettre recommandée avec accusé de réception permet d’interrompre la prescription.
- Agir rapidement en cas d’impayé : n’attendez pas que le délai de 2 ans soit presque écoulé pour engager des actions judiciaires.
- Conserver les preuves de la créance : garder une trace écrite des échanges, contrats, bons de commande, etc., pour prouver l’existence de la dette en cas de litige.
7. Cas particuliers : contrats à exécution successive
Dans le cadre des contrats à exécution successive (comme les abonnements ou les prestations mensuelles), chaque facture est soumise à son propre délai de prescription de 2 ans. Par conséquent, si certaines factures sont anciennes et prescrites, d’autres plus récentes peuvent encore être recouvrées.
En conclusion, le délai de prescription pour une facture entre un professionnel et un particulier est de 2 ans à compter de la date d’exigibilité. Passé ce délai, le créancier ne pourra plus engager d’action en justice pour obtenir le paiement. Toutefois, connaître les mécanismes d’interruption et de suspension de la prescription peut permettre aux professionnels de prolonger leurs droits de recouvrement. En cas de doute, il est toujours recommandé de faire appel à un avocat spécialisé ou à un commissaire de justice pour obtenir des conseils adaptés à chaque situation.